PRISE EN CHARGE DES ENFANTS A L IME ARC EN CIEL RENCONTRES ROSMES94 AVRIL 2019 Imprimer
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Vendredi, 06 Septembre 2019 14:03

PRISE EN CHARGE DES ENFANTS A L’IME ARC EN CIEL

FONDEMENTS ET TRAVAIL AU QUOTIDIEN, QUESTIONNEMENTS

Présentation réalisée par  Madame Valérie ENQUIN psychologue

 

Nous allons essayer à travers quelques grands traits de vous donner une idée concrète du travail que nous faisons au quotidien et sur la durée avec les enfants que nous accueillons, avec les valeurs et théories qui fondent notre travail.

 

L’IME Arc en Ciel accueille actuellement 50 enfants âgés de 6 à 19 ans. Ils avaient jusqu’à 14 ans jusqu’alors, mais les difficultés d'orientation nous ont conduit à pousser plus loin nos limites, non sans questionnement. Ces enfants présentent des tableaux cliniques variés. Historiquement, l’IME Arc en Ciel était connu pour accueillir des enfants présentant majoritairement des troubles dysharmoniques. Notre agrément stipule « des jeunes présentant une déficience intellectuelle moyenne à légère, avec ou sans troubles psychiques associés ».

Le projet d’établissement est basé sur l’accueil du sujet dans sa globalité et sa singularité, il repose sur l'articulation entre un axe constitué par le projet individuel qui porte l'enfant (fonction paternelle), et un emboitement d’enveloppes successives qui accueillent et contiennent l'enfant (fonction maternelle).

 

 

 

 

Pour chaque enfant on définit donc un projet individualisé (sur les versants éducatif, thérapeutique et pédagogique) tenant compte de ses appétences, ses compétences, ses difficultés, ses enjeux personnels. Ce projet est matérialisé par une carte, permettant à chaque enfant de savoir à chaque instant ou est sa place. Il est revu chaque année et évolue en fonction des évolutions de l'enfant.

Selon son âge principalement, l'enfant est inscrit dans une unité (Cadet, Junior ou Ado). Les 4 éducateurs responsables de chaque unité mettent au point une large palette d’ateliers psycho éducatifs permettant au travers de nombreuses médiations de travailler les différents axes de prise en charge au plus près des besoins de chaque enfant..

Comme il est signifié aux enfants lors de leur rendez-vous de préadmission, « Ici on aide les enfants à bien grandir ». Ce qui est visé c’est d’accompagner l’enfant vers le maximum d’autonomie et d’épanouissement personnel en privilégiant 3 axes de développement : celui de la subjectivation, celui de la relation et l’inscription dans le social, et celui des apprentissages (compétences, connaissances).

Voici une carte type :

 

On voit ici que tous les temps sont balisés, et qu’il y a dans la journée d’un enfant un grand nombre de temps successifs, chacun étant l’occasion d’une rencontre différente (adultes, groupes d’enfants, médiations). Ce déroulement quasi immuable dans lequel viennent s’imbriquer des temps de prise en charge pédagogique (dans l’Unité d’Enseignement sur place), ou thérapeutique (en psychomotricité, orthophonie, psychothérapie) constitue le socle, le cadre répétable et sécurisant.

 

Nous allons approfondir quelques fondements de notre accompagnement

 

- La première enveloppe dans laquelle est accueilli l'enfant est la référence : Chaque enfant est accueilli dans un petit groupe de référence (4 à 5 enfants), par un éducateur qui le suivra tout à au long de sa prise en charge (toutefois un questionnement autour des jeunes qui sont toujours à l'Arc en Ciel après 15 ans nous a conduit à faire évoluer nos pratiques).

La référence a lieu toujours dans la même salle, et même si cette salle accueille d'autres groupes sur d'autres temps de la journée,  elle est avant tout pour les jeunes « leur salle ». La référence est un lieu et un moment très ritualisé, à forte teneur symbolique. Le référent est la première surface de projection, le premier objet de transfert fléché pour chaque jeune. Ainsi la référence est un temps qui permet aux jeunes de déposer des choses, d’aborder certaines problématiques non abordables dans d’autres lieux. C’est un espace sécurisant, un temps où il n’y a pas de demande. On peut jouer parler écouter de la musique. Le référent représente le pilier du jeune dans son parcours arc-en-ciel.

 

Le projet global de chaque unité est adapté aux besoins spécifiques liés à l’âge et aux problématiques :

De manière transversale : une importance particulière est accordée au jeu et à la créativité, permettant l’expression des problématiques subjectives et la construction identitaire.

Egalement le sport constitue un important fédérateur, une médiation qui permet de travailler de nombreux aspects sans que l’enjeu relatif aux apprentissages en soit autant perçu, ainsi qu’une occasion de valorisation narcissique pour certains enfants.

Les sorties (ateliers à l’extérieur comme sorties exceptionnelles) sont un élément important de prise en charge, qui permettent aux enfants de prendre place dans le tissu social environnant.

 

En Cadet par exemple il est essentiellement travaillé l’apaisement (commencer à se poser dans un atelier) l’intégration du cadre, l’instauration d’un sentiment de sécurité et de continuité,  faire confiance à l’adulte pour commencer à montrer ses difficultés, se risquer à une tâche, pouvoir trouver du plaisir à faire. Les médiations sont beaucoup axées autour de la sensorialité, de la rythmicité, des habiletés manuelles fondamentales, de l’expression à l'aide de supports concrets.

 

Le travail trans disciplinaire :

Le dispositif de prise en charge des enfants à l’IME se fonde sur la pluralité des rencontres. Chaque professionnel est ainsi susceptible de rencontrer chaque enfant, dans des temps formels ou informels. Ceci permet à chaque enfant de fonder des liens à tonalités différentes et de pouvoir mettre au travail selon différentes modalités les enjeux qui le traversent. Le projet s’appuie sur un maillage inter professionnel très serré. Le travail trans-disciplinaire est alors une nécessité afin de pouvoir élaborer collectivement les mouvements qui animent les enfants, qui peuvent venir se transférer dans les équipes, l’institution, et leur en restituer quelque chose, chacun de sa place et dans sa fonction. Ce travail se décline dans les différents temps de réunions (réunion d’unité, réunions d’équipes (thérapeutique, éducative), réunions cliniques et institutionnelles, groupes de travail).

 

Autour de l’enfant : la famille, et les éventuels partenaires (CMP, ASE…).

Pour chaque enfant le référent éducateur travaille en binôme avec un co-référent institutionnel (psychiatre ou psychologue institutionnelle). Ensemble ils rencontrent régulièrement la famille de l’enfant. Sur un socle de 3 rencontres par an, le rythme s’adapte aux besoins et peut aller pour certaines familles à certains moments jusqu’à 1 fois par mois.

 

Conclusion, questions :

 

C’est la pluralité des profils d’enfants qui fait à la fois la force et la difficulté du dispositif.  La force car les capacités et difficultés des uns et des autres peuvent créer et alimenter une vraie dynamique d’entraide groupale.

Difficulté car il demande une souplesse et adaptabilité constantes, l’équilibre dans les groupes est précaire et toujours à surveiller. Les mouvements de groupe peuvent devenir une « contamination ».

 

Une admission est toujours un pari. Une rencontre en pré admission et une observation de 1 journée à une semaine ne suffisent pas pour présumer de la manière dont l’enfant et ses parents vont rencontrer le dispositif.

Selon, l’histoire de l’enfant, celle de sa famille, les rencontres faites à l’IME, ses ressources propres, il va pouvoir à un moment donné se saisir ou non des propositions qui lui sont faites.

 

Certains enfants ont, dit-on, « toute leur place ici », alors même qu’au départ on pourrait imaginer le contraire. (Cas d’une jeune venant d’Haiti, très entravée et marquée par le traumatisme subi, qui après une prise en charge thérapeutique très soutenante, un gros travail socio éducatif, a réussi à apprendre à lire, est devenue une adolescente épanouie, est partie en IMPro)

D’autres enfants aux difficultés cognitives moins prononcées, mais souffrant d’une forte inhibition, ont pu se re-narcissiser dans cet environnement protégé, là ou l’inclusion aurait été trop attaquante, ce qui leur a permis de réintégrer à leur rythme en respectant un temps de transition, des dispositifs scolaires (ULIS école / collège).

 

Il y a ces enfants qui nous semblent « à la limite entre Hôpital de Jour et IME », voire qui selon nous auraient dû être en Hôpital de Jour mais qui faute de place sont pris en charge à l’Arc en Ciel. Ces enfants débordent parfois nos capacités de contenance groupale, et nous font ressentir l’échec, l’impuissance, nous plongent dans leur vécu d’objet éternellement insatisfaisant.

 

Parfois « ça va mieux » : nombreux cas de jeunes entrés dans des états de grande désorganisation multipliant crises clastiques et passages à l’actes violents sur les autres enfants, sur les adultes... se sont finalement apaisés et sont aujourd’hui en IMPRo, ce qui a été impensable pendant longtemps. Ces trajectoires ne peuvent se faire qu’en appui sur un secteur très présent (CMP, CMPP), voire une articulation « hors cadre habituel » (cas d’un jeune accueilli à mi temps, au départ avec une ressource dédiée à son soutien, avec tout au long de sa prise en charge un suivi en CMP et une prise en charge à mi temps en CATTP, qui va aujourd’hui pouvoir aller en IMPro)

 

D’autres fois « ca s’aggrave », dans ces cas là souvent il faut en appeler au tiers social ou psychiatrique (ASE, CMP, ULPIJ…) temporairement ou plus radicalement

On assiste parfois à des décompensations plus ou moins rapides. On se culpabilise :

Aurait-on présumé de la capacité de l’enfant à supporter le collectif, de côtoyer autant d’enfants d’âges et de pathologies très variables, de supporter un emploi du temps qui ne souffre pas de temps respiration, pas de vide, qui « attend les enfants » à une place, puis à une autre puis à une autre etc. N’a t-on pas su accueillir ses parents leurs angoisses est on allés trop vite, pas assez pour « travailler leur déni » des difficultés de leur enfant ?

Ces situations ont un fort impact sur la vie de l’équipe : « ça nous divise », « ça nous agite », « ça nous fait souffrir »… On en vient à  douter de notre capacité à soigner, à se dire qu’ils seraient mieux ailleurs, à rêver d’un hôpital-miracle qui pourrait prendre en charge ces enfants au plus près de leur besoin.

 

A la fin se pose la question de l’orientation.

De plus en plus de jeunes « ne pourront pas aller en IMPro » où les exigences en terme de compétences et d’autonomie sont trop importantes.

Le manque de structure pour ces jeunes soit trop malades (Hôpital de Jour adolescents) soit trop peu autonomes psychiquement (IME/IMP) nous contraint à faire évoluer notre accueil, dans une certaine violence subie.

Dans nos représentations, l’Hôpital de Jour, le recours au « sanitaire » comme on dit, peut aussi être pour les professionnels une issue insatisfaisante (nos représentations réciproques sont à travailler !)

Mise à jour le Vendredi, 06 Septembre 2019 15:00